8 Mai 2016
Aujourd’hui, je souhaitais vous parler du côté obscur de la surdité. Ce côté que les entendants n’imaginent pas. Un côté qui, pour beaucoup de déficients auditifs est un poids au quotidien car il implique une grande fatigabilité.
Ne pas bien entendre est épuisant car mal entendre demande beaucoup plus d'énergie et d'efforts de concentration que ce que ne doit fournir une personne entendante dans une situation équivalente. L’autre jour, je discutais avec la toiletteuse de mon chien, qui vous le savez, est malentendante, et elle m’a confirmé que tout comme moi, elle aussi se sent très fatiguée et stressée certains jours à force de devoir faire des efforts conséquents pour comprendre sa clientèle et communiquer avec son entourage ou ses ami(e)s.
En effet, nous, les malentendants, sommes coincés entre deux mondes (celui des entendants et des sourds). Notre handicap étant invisible, les entendants l’occultent facilement sans avoir la moindre idée des efforts que nous faisons pour comprendre et suivre la moindre discussion, afin de vivre au quotidien un semblant de vie normale qui ne l’est, de ce fait, plus du tout. Le fait de devoir constamment tendre l'oreille provoque aussi des tensions musculaires au niveau du cou et des épaules. Si les entendants regardaient bien ils remarqueraient que nous écoutons avec un regard fixe et une oreille tendue en avant vers l'interlocuteur, ce qui sont autant de signes d'efforts physiques et mentaux pour suivre une conversation.
Il y a quelques temps, j’avais lu, dans un magasine, chez mon ORL que les déficients auditifs souffrent souvent d'insomnies (surtout lorsque les acouphènes sont mal vécus) plus ou moins chroniques ce qui conduit à du surmenage et engendre de la détresse psychologique. A cela, s’ajoute des tensions relationnelles parce que le malentendant donne l'impression d'avoir compris, alors qu'il n'a pas compris, ou bien les proches ont l'impression qu'il ne comprend que ce qu'il veut bien comprendre. Cette croyance enfonce le malentendant encore un peu plus dans son mal-être général. En effet, me concernant, que se soit lors d’un repas en famille, il y a quelques temps ou ma dernière sortie au restaurant, je me suis sentie exclue car je n’arrivais pas à suivre ce qui se disait et dans ces cas là, non seulement je trouve le temps très long mais mon interlocuteur, lui s’agace ou pense que je le snobe carrément.
Quand j’en parle à mes médecins (généraliste ou ORL), ils me servent le discours classique qu’on leur a enseigné à savoir, je dois me ménager des moments de pause, me relaxer, ne surtout pas m’isoler et dire à mon entourage ou mes ami(e)s de « s’adapter »etc… Oui, mais, eux, oublient constamment mon handicap, voire le minimise (elle entend un peu mal – elle a du mal à entendre). Donc retour à la case départ !
Du coup, je fais comme beaucoup de déficients auditifs, je parle peu de mon handicap, d’une part parce que les gens ne veulent pas « entendre » (et donc comprendre) car ça leur évite de devoir faire l’effort de s’adapter et d’autre part parce que la surdité est encore considérée comme une maladie de vieux. Je dis que je suis malentendante, mais sans entrer dans les détails. Et c’est moi qui m’adapte tout le temps.
Alors, oui, je fais des articles et j’en parle. Je me dis que plus on en parle et plus ça aidera d'autres sourds et malentendants à vivre plus sereinement avec leur handicap avec l’espoir que cela aura pour résultat que l'entourage comprenne mieux, n’oublie plus et s’habitue à s’adapter pour mieux vivre ensemble et sans tensions inutiles, ceci afin de mieux vivre la « malentendance » au quotidien.
Foeby Anne / Ma vie entre deux mondes / Facebook : Foeby Anne / Maman Malentendante / Le côté obscur de la surdité
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