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Ma vie entre deux mondes

Chronique de ma surdité #9 : Handicap et fratrie.

Qu’il vous tombe dessus dès la naissance ou qu’il survienne suite à une maladie ou un accident, le handicap n’est jamais  facile à gérer.  Il est avec vous 24h/24 et rien ne peut l’effacer. Vous évoluez dans la vie avec le regard et le jugement des autres qui sont rarement bienveillant. Mais quand en plus, ce jugement et ce regard viennent de votre entourage, c’est encore plus difficile à supporter.

 

Vilain Petit Canard, Versus Petit Ange.

Comme je l’explique dans mes premiers articles de ce blog, mes parents m’ont toujours soutenue. Il n’en est pas de même des autres membres de ma famille.  J’ai un frère ainé, plus âgé de trois ans. A sa naissance, il était le petit Roi de la famille.  Notre grand-mère maternelle, qui venait souvent passer plusieurs semaines chez nous dans l’année, l’idolâtrait et lui passait tout. Quand je suis née, il a dû apprendre à attendre son tour et à partager, ce qui a été très compliqué pour lui. Dès le plus jeune âge, j’ai le souvenir d’une grand-mère aux mots blessants à mon encontre. J’étais le vilain petit canard et il était le petit ange !

 

Une mauvaise influence

Ma mère n’a jamais crié sur les toits que j’étais malentendante. Mais cela se savait dans la famille. Et lorsque je suis rentrée à l’école, j’ai tout de suite compris que mon frère était vu comme le « génie » de la famille alors que moi je « n’avais pas les capacités », « je ne comprenais jamais rien ». Influencé par ma grand-mère maternelle, mon frère avait envers moi, les mêmes remarques blessantes et les mêmes comportements que ma grand-mère. Quand ma mère lui demandait de m’aider pour mes devoirs, il le faisait gentiment parce qu’elle était avec nous, mais si j’avais des difficultés à comprendre, il lui arrivait de faire des remarques blessantes que ma mère n’entendait pas toujours. S’il est vrai qu’il m’a souvent aidé pour les devoirs, il était malheureusement conditionné à formuler des réflexions dont il ne devait pas, lui-même, comprendre la portée pour son âge. Très souvent dans les réunions de famille, j’entendais des phrases comme « elle n’arrivera jamais à rien », « elle sera un boulet toute sa vie ». Tout un chacun était persuadé que j’étais très en retard sur tout ! Heureusement mes parents n’ont jamais lâché l’affaire.

 

Terreur d’une grande solitude

Un autre problème que je ne comprenais pas à l’époque a ruiné mes nuits et a amplifié les remarques désagréables de ma grand-mère et de mon entourage. Très jeune, 5 ans,  j’avais terriblement peur de dormir seule dans ma chambre.  J’attendais que tout le monde dorme et j’allais m’allonger au bas du lit de mes parents. Quand ma mère se réveillait et me voyait au sol dans le froid, elle me faisait monter auprès d’elle et seulement là, je trouvais une sécurité qui me permettait de m’endormir. Dès que je me retrouvais dans le noir, j’avais l’impression que quelqu’un était dans ma chambre, marchait à l’extérieur devant ma fenêtre ou dans l’appartement. Toute ma famille se moquait de moi au lieu de chercher à comprendre pourquoi j'étais terrifiée. Ma grand-mère n’a pas raté le coche et a parlé de suite de comédie, qu’il ne fallait pas me céder etc…. Elle m’a traité de bébé, de capricieuse, mon frère a suivit pour lui plaire et sans se rendre compte que j'en souffrais. C’était terrible pour moi qui vivais dans la terreur chaque nuit. A l’âge de 13 ans, j’ai, un soir, réalisé que ces bruits étaient aussi là quand la lumière était encore allumée. Je ne savais pas encore que c’était des acouphènes. Mais je savais que j’entendais dans le silence du soir, les bruits que j’entendais dans la journée. J’étais suffisamment âgée pour comprendre que je ne devais pas avoir peur. Et j’ai commencé à dormir dans mon lit plus sereinement. Aujourd’hui encore, j’ai ces bruits, mais je sais qu’il s’agit d’acouphènes et bien-sûr ils ne me font plus peur. Mais à l’époque, jusqu'à ce soir de mes 13 ans, j’étais terriblement seule face à mes peurs avec un entourage se pensant intelligent en se moquant de moi.

 

Des propos qui influencent

Le handicap dans la famille n’est jamais bien vécu. Dans les fratries,  les propos et les comportements des adultes influencent ceux des plus jeunes. L’enfant handicapé sera soit  aimé et entouré (limite sur protégé) ou bien, comme dans mon cas, sera moqué et isolé. Me concernant, j’ai grandi seule. Je voyais les copains de mon frère sortir avec leur sœur, tandis que moi on me tenait éloignée. Il en a résulté le manque énorme de confiance en moi que j’ai encore aujourd’hui. Le tout complété par les mots et comportement des adultes de mon enfance (famille, instits, amis et connaissances parentaux etc..).  Mon frère n’a jamais vraiment été méchant au sens propre du terme. Ce sont ses mots et ses comportements acquis via ma grand-mère qui m’ont blessée. Il ne m’a jamais vu que comme  « une mocheté peu intelligente » (comme il disait à 15 ans !). Adolescents, nous nous battions aux mains. Et quand il a vu que je commençais à avoir de la répartie, il s’est calmé. Je suis devenue invisible à ses yeux. De mon côté, je l’ai toujours aimé, même si il ne l’a jamais su. Je l’ai toujours aidé quand il me demandait.

 

Une Rébellion mal vue.

Aujourd’hui encore, les mots m’atteignent. Il n’est pas rare dans une réunion de famille qu’on me fasse encore passer pour une imbécile. Pourtant, avec mes études de psycho et un diplôme d’anglais, je survole même le BTS de mon frère. Je ne me laisse plus faire, je réponds et je me défends et ça, ça a du mal à passer. Pour eux je devrais rester la gentille « truffe » qui ne dit rien. Du coup, je suis mal vue ! Mais je m’en fiche. Je vis ma vie. Je suis heureuse avec mon mari, ma fille et ma mère et mon job et c’est bien là le principal. Quant à mon frère, il sera toujours dans mon cœur. Je serai toujours là pour l’aider s’il a un coup dur. Je ne veux pas devenir aigrie par la méchanceté des autres. Mais, j’ai le droit de me défendre et que cela plaise ou non, je suis intelligente, belle dans mon cœur et je ne laisserai plus personne me dénigrer ou me faire du mal.

 

En conclusion, je dirais qu’il ne faut jamais isoler un enfant handicapé. Il ne faut jamais le dévaloriser devant d’autres enfants car cela conditionnera pour toujours les comportements des uns et des autres. Ma mère est une femme formidable qui a tout fait pour moi. Même si elle n’a pas tout vu ou tout entendu, je lui dois ce que je suis. Je ne lui arrive pas à la cheville, mais je fais tout pour.

 

Mon article pour gérer le handicap :
http://www.maman-malentendante.com/2017/10/la-minute-psy-mon-enfant-a-un-handicap.html

 

 

 

 Et vous, comment se comporte votre famille avec vous ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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F
Bonjour, que dire ?<br /> J'ai lu attentivement votre article qui est pour moi, plus qu'un "coup de gueule"; c'est une véritable thérapie... <br /> "Et vous, comment se comporte votre famille avec vous ?" : J'ai toujours été "la brebis égarée" comme dit mon frère... Et quand je regarde autour de moi... Je me dis que préfère ma place... L'enfant aux oreilles de vieux est aujourd'hui totalement heureux et c'est bien là le principal... <br /> Franck.
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F
Merci de votre commentaire qui me va droit au cœur. Nous avons probablement eut un peu la même enfance. Je suis contente que vous vous sentiez bien dans votre vie d'aujourd'hui. Je pense que notre soif de vivre et de prouver que nous ne sommes pas inférieurs aux autres est une force qui nous a permis de dépasser les obstacles. Restez vous-même et prenez chaque bonheur de la vie comme il vient. Merci de votre passage sur le blog ;-)
A
Tu as bien raison !!!! ce que tu dis est un cri du coeur qui m'a touchée. Je pense comme toi que ton frère ne devait pas se rendre compte réellement de ce qu'il disait, mais toi tu l'as mal vécu. Tes nuits ont du être terrible.... Aujourd'hui, ton frère est-il gentil avec toi ? Bisous
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F
Coucou Alyne !! Quel plaisir de te lire ;-) Merci pour ton commentaire. Oui en effet, mon frère était très jeune et ma grand-mère terriblement présente. Il ne s'est pas rendu compte de la portée de ses mots. Aujourd'hui, ce n'est pas pareil car j'ai vite fait de le remettre à sa place. Il a grandi (heureusement lol) et quand il fait une remarque qui me déplait, je répond du tac au tac !!! On s'entend bien, mais de loin lol !! Mes nuits ont été très difficiles en effet de 5 à 13 ans. Mais c'est derrière moi ;-) Merci de ton passage ;-)