18 Août 2016
Pendant mes dernières vacances, je suis allée voir de la famille entre Toulouse et Montauban. Qui dit famille, dit repas de famille et pour moi, malentendante, il y a de grands moments de solitude et de quiproquos.
Un trajet très très long…
A la fin de mon séjour à la Palmyre, nous sommes « descendus » vers Montauban où nous avons séjourné chez mon oncle. Le lendemain de notre arrivée, nous sommes tous partis à une voiture pour aller déjeuner chez mon frère à 1h15 de là près d’Albi. J’étais assise à l’arrière. Je n’entendais pas ce qu’il se disait entre mon mari (conducteur) et mon oncle (son passager avant) et ma mère assise à côté de moi. Si j’entendais les mots de ma mère, je n’entendais pas les deux autres, j’avais donc une discussion à sens unique à laquelle je ne comprenais rien. Je choisis donc de regarder le paysage défilant pendant 1h15 et je peux vous dire que le trajet m’a vraiment paru très long. Pendant le trajet mon mari m’a demandé deux fois si j’allais bien car on ne m’entendait pas. D’habitude, je suis son passager avant et il est vrai que nous discutons souvent. Là, je lui répondais donc que je n’entendais qu’une partie de la conversation, donc il m’était difficile d’y prendre part, ce qu’il comprit tandis que je retournais à ma solitude.
Seule dans la foule…
Arrivés chez mon frère, après les salutations d’usage, je me trouvais entourée de dix personnes qui parlaient et riaient, mais j’avais le plus grand mal à suivre car même avec mon appareil, les mots se trouvaient brouillés de par le bruit des différentes voix ; les éclats de rires et le fait que tous parlaient en même temps. Je défie quiconque d’essayer de lire sur les lèvres de dix personnes en même temps. C’est mission impossible. Une fois de plus, je me retrouvais seule avec moi-même pendant presque deux heures. Une fois de plus, on me demanda deux ou trois fois « si j’allais bien » car je ne disais rien. Que répondre ? Si j’avais dit « je ne vous comprends pas donc je ne peux pas suivre et parler avec vous » ça aurait été surement mal pris. Ils se seraient sentis coupable et ça aurait un peu plombé l’ambiance. Sur le moment, ils auraient dit « ah oui c’est vrai », mais ensuite, ils seraient retournés à leur vie, leur discussion d’entendants et auraient oublié mon handicap. Car les entendants ont ce problème qui est d’oublier dans la seconde qui suit le fait qu’une personne malentendante ne puisse pas bien entendre donc comprendre. Je le vis tous les jours au travail ou avec mes ami(e)s et ma famille ne fait pas exception. Je ne leur en veux pas. Ils entendent normalement, donc ils ne peuvent pas comprendre ce que je vis au quotidien. De plus, il y avait une personne que je ne connaissais pas à ce repas et j’étais placée en face d’elle. Mais cette personne, ne connaissant pas mon handicap parlait en baissant la tête et dans sa barbe. Ne comprenant rien, je ne lui ai pas parlé du repas. J’ai dû passer pour hautaine ou demeurée (c’est au choix !!!, quoique les deux cumulés sont aussi possible). Pourquoi, je ne lui ai pas dit d’emblée que j’étais malentendante ? Tout simplement parce que j’en ai marre d’être toujours celle qui se singularise. Mais il est vrai que vue de l’extérieur, je dois probablement donner l’image de celle qui s’ennuie, qui snobe les autres ou pire qui plombe l’ambiance. Alors qu’en fait, je suis juste spectatrice d’un film muet auquel je ne comprends pas grand-chose.
Je m’isole ?
A la fin du repas, voyant que je souffrais beaucoup de la chaleur, mon frère me proposa de rentrer au salon où il me mettrait la climatisation. J’acceptais avec reconnaissance car j’étais à deux doigts de comater tant la chaleur m’accablait. Il me proposa la télévision et je choisis un programme. Le fait d’être seule dans une pièce climatisée et à regarder un programme que je comprenais (pour l’avoir déjà vu), je me sentis de suite beaucoup mieux. De la à penser que mon ORL a raison quand il dit que je m’isole, il n’y a pas loin. En effet, je me suis isolée plusieurs fois, mais à choisir entre une situation où je me sens exclue (la faute de personne, juste celle du handicap) par la force des choses et une situation où je me sens bien. Je choisis celle où je me sens bien. En même temps qui ferait le contraire ?
Des WC… quoi ?
Mais les réunions de famille ont aussi leur lot de quiproquos comme lorsque j’ai demandé à mon oncle si je pouvais utiliser son PC Portable et qu’il a compris « WC Portable » ! Il m’a donc répondu :
- Quoi ? Mais qu’est-ce que tu veux faire avec mes wc ? Ils ne sont pas portables ?
Et moi de penser dans les premières secondes « mais pourquoi il me parle de wc sortables ? ».
Je lui explique donc :
- Mais non, ton ordinateur portable !
Le tout suivi d’un grand éclat de rire général ! Cela fait un quiproquo de plus qui restera dans les mémoires !!
En conclusion, je dirai que les entendants ne voient pas notre handicap. Il est vrai que celui-ci n’est pas visible et qu’on l’oublie facilement et très vite. La famille ne fait pas exception au fait d’occulter la surdité. C’est, je pense, le lot de tout malentendant de se sentir parfois exclue en famille entendante, l’oublie étant involontaire car dû à l’invisibilité du handicap. Mais ça peut être très lourd à porter par la personne malentendante. Et ça, les entendants ne le voient pas non plus.
Foeby Anne / Ma vie entre deux mondes / Facebook : Foeby Anne / Maman Malentendante / Malentendante en famille
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